La cathédrale Notre-Dame d’Anvers, une révélation.
La collégiale et son chœur
Quarante ans se sont écoulés entre la construction des fondations et le voûtement : de 1351 à environ 1391. Le chœur et sa charpente sont, avec les voûtes, l’une des plus anciennes réalisations architecturales d’Anvers, presque intactes. La plupart des clés de voûte datent d’avant 1391. Depuis leur restauration en 1992, ils montrent à nouveau leur qualité d’origine et leur polychromie vive, qui ont été conservées sous plusieurs couches de chaux. En tant que personnage, nous voyons, d’ouest en est, en premier : Jean-Baptiste, montrant l’Agneau de Dieu sur son bras. La sculpture disparue de la deuxième clé a été rénovée en 1993 avec en relief Marie et l’Enfant. Saint Pierre montre fièrement sa clé et présente son article de foi dans un livre ouvert : « Credo in Deum p[atrem] » (Je crois en Dieu le Père). Enfin, chacun reçoit la bénédiction du Christ Sauveur dans l’abside. Sa face fracturée s’explique probablement par le tube métallique qui a été percé plus tard à travers le relief. Ce tube mystérieux – qui par hasard se trouve à hauteur de sa bouche – s’ouvre sur un réservoir en forme d’entonnoir au-dessus de la voûte. Servait-il à accrocher quelque chose juste au-dessus ou devant le maître-autel médiéval ou baroque ? Ou à projeter quelque chose vers le bas?
Les stalles de chœur
Dès son origine et jusqu’en 1798, L’église Notre-Dame fut une église collégiale ou capitulaire, où un chapitre de chanoines, porté de 12 à 24 en 1224, prie les offices en communauté. Parce qu’ils y prient surtout en chantant, ce lieu de prière distinct est aussi appelé le « chœur ». Depuis les stalles du chœur, les chanoines se tournaient vers l’autel principal à l’est pour célébrer l’eucharistie capitulaire.
En l’absence d’autres lieux de congrès, le chœur muni de ses stalles se prête depuis des siècles à d’importantes réunions. Le 22ième chapitre de l’Ordre de la Toison d’Or se tiendra ici en 1555. À titre de souvenir, les armoiries des commandeurs, conformément à l’usage, demeurent accrochées au-dessus des stalles du chœur, et ce pendant près de 250 ans – jusqu’ à ce que le régime révolutionnaire français les brûle publiquement. Le fait que les trois vitraux de l’abside soient offerts par le grand-maître de l’ordre à l’occasion de cette réunion est moins fréquent, mais témoigne en ce haut lieu de la cathédrale de l’imbrication de la politique et de la religion à cette époque. Sur la fenêtre de gauche, iconographiquement à droite, se trouve le grand-maître, le roi Philippe II d’Espagne, agenouillé sur un prie-Dieu : face à lui se trouve son épouse d’alors, l’anglaise Mary Tudor. Tous deux sont patronnés par leur patron respectif : l’apôtre Philippe et Marie à l’enfant. Le vitrail central est dédié à l’Ordre de la Toison d’Or, représenté par son patron saint André, avec la peau de bélier de la Toison d’Or à ses pieds, l’insigne de l’Ordre, la croix de Saint-André avec le briquet bourguignon. La figure de saint Paul nous rappelle sans doute le précédent trio de vitraux qui, en 1408, fut payé par des criminels à titre d’amende, et sur lequel le chœur les apôtres Pierre et Paul se tiennent de part et autre des armoiries de la ville d’Anvers. Les vitraux, installés par Cornelis van Dale en 1557, ont été largement rénovés par la firme Stalins et Janssens en 1875.
Nous ne pouvons que deviner l’aspect du meuble médiéval de style baroque datant d’environ 1610 et vendu sous le régime Révolutionnaire Français. Cependant nous pouvons en avoir un aperçu grâce au carnet de croquis dans lequel l’artiste Pieter van Lint fait le tour de la cathédrale vers 1625. Malgré l’abolition du Chapitre à la suite du Concordat de 1801, la fabrique d’église souhaite acquérir de nouvelles stalles destinées aux ecclésiastiques, choristes et marguilliers. Dans un concours organisé en 1839 le choix tombe sur le projet néo-gothique de Frans Durlet, un jeune architecte et sculpteur de 23 ans, qui s’était déjà fait une renommée dans l’essor du renouveau néo-gothique. Il prévoit un ensemble monumental sans égal, d’une taille hors pair, en accord avec le maître-autel de l’époque exagérément néo-classique. Pendant une période ininterrompue de près de 40 ans (1840-1881), plusieurs sculpteurs tels que Joseph Jacques Ducaju, Karel Geerts et Jan Baptist de Cuyper y travaillent, sous la direction de Joseph Geefs, mais la part du lion fut finalement fournie par Jean-Baptist van Wint et Jean-Baptist de Boeck.
- Cathédrale Notre-Dame
- Histoire & Description
- Avant-propos
- Introduction
- Contexte historique
- Construite au fil des siècles
- Une cathédrale n’est jamais seule
- La tour Notre-Dame
- Le portail principal
- L’effet spatial
- L’Assomption de Marie (C.Schut)
- L’Érection de la Croix (PP.Rubens)
- La Descente de la Croix (PP.Rubens)
- La Résurrection (PP.Rubens)
- L’Assomption de Marie (PP.Rubens)
- Le maître-autel
- Le chœur collégial
- L’église de l’évêque
- L’église paroissiale
- La chaire de vérité
- Les confessionnaux
- L’assistance aux pauvres
- La chapelle du Saint Sacrement
- La chapelle Mariale
- Corporations et Guildes
- Le déambulatoire
- Les monuments funéraires
- Louez le Seigneur !
- À pleins registres : les orgues
- Le porteur de la Croix (J.Fabre)
- Bibliographie
Les stalles offrent 72 places assises, de chaque côté une rangée inférieure et une rangée supérieure de 18 sièges, interrompues au milieu par une haute tour d’escalier, qui fait référence à la grande tour de l’église. Dans l’adossement, les 36 scènes en haut relief racontent l’histoire de la vie de Marie. Plus haut encore, une profusion de figures bibliques et de saints, ainsi que des anges porteurs des instruments de la passion. Dans chacune des quatre zones, il y a une rangée de huit cloisons portant chacune une figurine. Du côté de l’autel de la croisée il y a les huit pères de l’église faisant face à tout autant de fondateurs d’ordre. Du côté du maître-autel, les rangées de huit statuettes (œuvre de Joseph Jacques Ducaju) donnent une représentation surprenante de deux textes évangéliques qui forment l’essentiel du message de Jésus.
Côté nord nous est montré comment prier comme Jésus nous l’a enseigné : Le Notre Père (Mt. 6:9-13) commençe à partir de la tour centrale. Après l’en-tête, les sept prières sont représentées séparément.

À l’entrée de chaque stalle, les anges musiciens renforcent le chant choral. À l’opposé, sur les stalles côté sud, se trouvent les Béatitudes du Sermon sur la Montagne de Jésus (Mt. 5:3-12), qui louent un certain nombre d’attitudes de bonté inconditionnelle en tant qu’incitation au bonheur inestimable céleste. Ces ‘huit béatitudes’ se lisent de gauche à droite. Parce que jusqu’au Concile de Vatican II l’Église catholique utilisait la Vulgate comme texte biblique standard, l’ordre de la deuxième et de la troisième béatitudes diffère de la traduction biblique actuelle :


Bien que par sa richesse l’iconographie se veut édifiante, l’aspect ludique qui caractérise de nombreuses stalles médiévales est également présent ici, même s’il n’est pas à hauteur des yeux. Pourtant, les drôles de personnages du haut appartiennent – plus qu’on ne l’imagine à première vue – au contexte d’une stalle. Dieu mérite d’être loué pour toute la création : les nombreuses demi figurines d’anges, d’adultes et de choristes soutiennent de leurs chants joyeux et leur musique la louange liturgique qui s’élève des bancs en-dessous. À sa manière, la flore chante aussi la création. Les (trois) nids d’hirondelles rappellent le Psaume 84:1-3 : De quel amour sont aimées tes demeures, Seigneur, Dieu de l’univers, mon cœur et ma chair sont un cri vers le Dieu vivant. … Car même l’hirondelle a un nid pour abriter sa couvée. Pour moi, c’est ton autel, Seigneur de l’univers. Le même nombre de chauves-souris, en revanche, qui représentent généralement les forces obscures, reste pour le moment un point d’interrogation.
Annexes surtout pour les chanoines
À l’origine la salle capitulaire (2nde moitié du XIVe ou début XVe siècle) était à l’origine située au nord (voir chapelle Saint-Joseph). En 1482-1487, sous la direction d’Herman de Waghemakere, un bloc de bâtiments de service fut érigé à côté du déambulatoire méridional, dont la sacristie du chapitre, aujourd’hui la grande sacristie, qui est aussi proche que possible du chœur. Après 1585, la bibliothèque capitulaire adjacente, la « librairie », est aménagée comme salle capitulaire, tandis que la bibliothèque se déplace vers le Papenhof, plus ensoleillé.
Une sacristie séparée a été construite pour les nombreux chapelains desservant un des dizaines autels latéraux. À côté il y avait même un « comptoir pour le pain et le vin » séparé, où le vin de messe et le pain des hosties étaient entreposés.
La fabrique d’église, qui collabore avec le Chapitre jusqu’au Régime Révolutionnaire français, reçoit en 1640 une salle de réunion avec une « salle de paye » attenante (c’est-à-dire un coffre-fort), située à l’intérieur de l’ancien mur extérieur du « Nouvel Œuvre ».